Armes explosives en zones peuplées : une Déclaration politique significative
Ce 18 novembre se tenait à Dublin la cérémonie de signature de la Déclaration politique sur le renforcement de la protection des civils contre les conséquences humanitaires découlant de l’utilisation d’armes explosives dans les zones peuplées. Plus de 80 États l’ont signée dont la Belgique. Cette déclaration fait suite à plusieurs années de négociations et discussions autour des effets dévastateurs des armes explosives sur les populations civiles et présage un changement de comportement des Etats quant à leur utilisation en zones peuplées.
L’incidence humanitaire des armes explosives à large rayon d’impact
L’intensification des conflits en zone urbaine est caractérisée depuis plusieurs années par une utilisation accrue d’armes explosives à large rayon d’impact en zones peuplées. Leur puissant effet de souffle et leur rayon important de destruction, ainsi que l’imprécision de certains systèmes de lancement, entraînent souvent des effets indiscriminés et disproportionnés à l’encontre des personnes civiles et des biens civils, au-delà de l’objectif militaire visé.
Ces armes constituent la cause majeure des décès et des blessures graves physiques et psychologiques parmi les personnes civiles et détruisent incidemment de nombreuses infrastructures civiles critiques telles que les installations médicales ou les systèmes d’approvisionnement en eau et en électricité. Au-delà des conséquences directes, des effets indirects, moins visibles mais tout aussi dévastateurs, peuvent aussi résulter des dommages causés incidemment aux infrastructures critiques : la privation de biens et services essentiels dépendant de ces infrastructures peut entraîner à son tour des décès et la propagation de maladies au sein de la population civile.
Les conséquences humanitaires dévastatrices causées par ces armes ont poussé les Etats à se réunir afin d’élaborer un engagement politique international protégeant mieux les populations civiles.
Une déclaration incarnant l’engagement des Etats à changer leurs pratiques
Cette déclaration résulte d’un long processus diplomatique lancé en 2019 par l’Irlande visant à renforcer la protection des civils contre l’impact de l’usage des armes explosives en zones peuplées. Réunis à Dublin, plus de 80 Etats se sont engagés à restreindre l’usage d’armes explosives dans les zones où vivent les populations civiles. Cette déclaration politique internationale ambitionne un meilleur respect du droit international humanitaire et un changement des pratiques durant les combats afin de minimiser les effets néfastes sur les zones civiles. Ces armes n’étant pas interdites, la déclaration politique s’inscrit dans une volonté collective de limiter l’usage de ces armes en zones peuplées afin d’améliorer la protection des civils dans ce type de contexte.
Un « signal fort » pour les années à venir
Cette déclaration reconnaît explicitement les effets dévastateurs des armes explosives dans les zones peuplées et réaffirme avec fermeté les principes de distinction, de proportionnalité et de précaution applicables à l’utilisation des armes explosives dans les zones peuplées. Elle envoie un message fort en appelant les Etats à adopter des politiques et pratiques, notamment par la restriction ou l’abstention de l’usage de ces armes, en vue de renforcer la protection des populations civiles qui se retrouvent au centre de combats. Mirjana Spoljaric, présidente du Comité International de la Croix-Rouge (CICR) se réjouit de cette avancée et a déclaré « Cela envoie un signal fort pour que les belligérants ne puissent pas continuer à se battre dans des zones peuplées comme ils le faisaient jusque-là. Ce changement de perspective est crucial ».
Depuis 2011, avec l’appui des Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, le CICR alerte sur les conséquences humanitaires des armes explosives et recommande d’appliquer une « politique d’évitement » d’utilisation de ces armes dans les zones densément peuplées. Cela signifie que les armes explosives à large rayon d’impact ne devraient pas être utilisées dans les zones peuplées, sauf si des mesures suffisantes sont prises afin de limiter leur rayon d’impact et le risque de dommages causés aux civils et aux biens de caractère civil. C’est dans cette perspective qu’un rapport intitulé « Emploi d’armes explosives à large rayon d’impact en zones habitées : un choix meurtrier » publié par le CICR en janvier 2022, énonce diverses recommandations aux Etats pour éviter d’utiliser de telles armes.
Pour plus d’informations, nous vous recommandons les articles suivants, rédigés par Frédéric Casier, Conseiller juridique en DIH à la Croix-Rouge de Belgique :
- Utilisation d’armes explosives à large rayon d’impact en zones habitées : conséquences humanitaires et recommandations – Le Droit International Humanitaire (croix-rouge.be)
- Une résolution appelant à éviter l’utilisation d’armes explosives à large rayon d’impact en zones peuplées – Le Droit International Humanitaire (croix-rouge.be)