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Le Droit International Humanitaire
26.04.2019 |

La guerre au cœur des villes : un défi contemporain

Conférence sur les Guerres urbaines: A la recherche de solutions pratiques aux défis contemporains, Bruxelles, le 25 Avril 2019

Des siècles durant, les conflits armés se sont essentiellement déroulés sur de vastes champs de bataille. Des milliers d’hommes, d’importants corps d’armée et des armements lourds étant déployés de part et d’autre sur un grand théâtre de guerre. Si les villes étaient parfois assiégées ou saccagées, les combats se déroulaient rarement dans les rues. Mais les conflits s’urbanisent, à l’image du monde, et la quasi-totalité des combats ont lieu désormais au cœur des villes. A tel point que les centres-villes et zones résidentielles sont devenus les champs de bataille et lignes de front de notre siècle.

Une conférence pour rassembler des représentants des Etats et des experts

C’est la raison pour laquelle, le jeudi 25 avril 2019, la Commission interministérielle de droit humanitaire, la Croix-Rouge de Belgique et le Comité international de la Croix-Rouge ont organisé, avec le soutien de la Société belge de droit international, une conférence au Résidence Palace à Bruxelles intitulée « Les guerres urbaines : A la recherche de solutions pratiques aux défis contemporains ». Durant cette journée, rehaussée par la présence du Ministre des Affaires étrangères et de la Défense, Didier Reynders, les débats ont tourné autour de questions telles que la mise en œuvre concrète du principe de précaution dans les conflits urbains, les défis juridiques et opérationnels liés aux méthodes et moyens de guerre ou encore les défis posés par ce type de conflit en termes d’action humanitaire.

Conférence « Les guerres urbaines : A la recherche de solutions pratiques aux défis contemporains »

Comment appliquer le DIH dans le contexte des guerres urbaines ?

La conduite des hostilités en zone urbaine est, par essence, complexe et soulève des défis importants pour la mise en œuvre des règles et principes du droit international humanitaire (DIH). L’application des principes de distinction et de proportionnalité se heurte à la difficulté d’obtenir des renseignements précis dans des villes densément peuplées, particulièrement en l’absence de forces sur le terrain. La présence, au même endroit, de combattants et de civils ainsi que la présence inévitable d’équipements à double usage nécessitent de nouvelles procédures et stratégies de ciblage en vue de minimiser les dommages collatéraux. De plus, l’inadéquation des méthodes et moyens de guerre conçus pour une utilisation sur des champs de bataille ouverts ainsi que la résurgence de tactiques de guerre ancestrales, telles que les sièges, ont donné lieu à d’intenses discussions parmi les praticiens et les universitaires.

La population civile, première victime des conflits urbains

Les conflits armés ont d’effroyables conséquences pour les personnes vivant actuellement dans des villes en guerre. Les combats incessants entraînent un grand nombre de morts et de blessés parmi les civils ainsi qu’un stress traumatique.  Les gens sont contraints d’abandonner leurs maisons, les infrastructures vitales qui assurent le fonctionnement des communautés sont endommagées ou détruites et l’accès à l’aide humanitaire est souvent entravé voire même refusé, empêchant les gens d’accéder aux biens et services les plus essentiels. Enfin, lorsque l’évacuation des villes assiégées est possible, le déplacement soudain de milliers de personnes engendre de nouveaux défis humanitaires majeurs.

Perspectives contemporaines des guerres urbaines

Durant la journée de conférence, les experts militaires et humanitaires ont émis quelques recommandations générales qui devront être approfondies par la suite. Tout d’abord, si les militaires et les humanitaires ont des missions dont les enjeux sont distincts, il est important qu’ils puissent continuer à partager leurs approches et leurs préoccupations respectives dans le but ultime de protéger les civils des effets des hostilités. Ensuite, les  guerres urbaines ne remettent pas en cause la pertinence du DIH existant : l’enjeu n’est pas de développer de nouvelles règles, mais de déterminer la manière de les appliquer effectivement dans le cadre de l’urbanisation croissante des combats afin d’en atténuer les effets à l’égard des civils. Enfin, l’expansion des villes, la densité de la population toujours plus importante, la diversité des parties aux conflits (forces armées des Etats et groupes armés non étatiques) et la complexité des relations qui en résulte ainsi que la violence des combats, constituent autant de défis contemporains auxquels le DIH fait face.

Mieux préparer les militaires et les humanitaires

Pour préparer au mieux les militaires, de nombreuses suggestions ont été formulées comme l’utilisation des moyens de combat plus précis et des restrictions spécifiques sur l’usage de certaines armes problématiques, des modes de communication plus modernes avec la population en vue de l’avertir des attaques et de la guider au mieux lors des évacuations ou encore des procédures opérationnelles plus claires afin de mieux anticiper les dommages incidents résultant d’une attaque. Quant aux humanitaires, leur approche opérationnelle est amenée à évoluer en développant non seulement des programmes d’urgence, mais aussi en répondant aux besoins humanitaires de la population sur le long terme en raison notamment de la destruction des infrastructures de base et des déplacements de civils dans les villes. Face aux violations fréquentes du DIH, à la politisation de l’aide humanitaire et à la stigmatisation de l’ennemi incluant parfois les civils, les acteurs humanitaires doivent dialoguer de manière plus proactive avec toutes les parties au conflit afin de rappeler le respect des règles du DIH et de l’aide humanitaire impartiale, neutre et indépendante pour un meilleur accès aux victimes. Le dialogue des Etats tiers est également important car ils peuvent jouer un rôle d’influence auprès des parties au conflit en vue d’un meilleur respect du droit.

En conclusion

La Croix-Rouge poursuivra ses consultations avec les Etats sur la problématique des guerres urbaines pour identifier les bonnes pratiques existantes sur le plan militaire et les aspects à améliorer et encourager le partage de ces pratiques. Les résultats de la conférence permettront de nourrir les apports de la Belgique aux travaux du Conseil de sécurité des Nations Unies, notamment sur des questions telles  que la protection des civils, les enfants en temps de conflits armés et l’accès à l’aide humanitaire.

Le résumé des actes de la conférence (en français) est disponible en cliquant ici !

 

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